Air extérieur

La pollution atmosphérique affecte t-elle les yeux ?

Publié le 27 Décembre 2024
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l’exposition à une forte concentration de polluants au cours du temps pourrait augmenter le risque de glaucome @ freepik

Problèmes respiratoires, irritations… la pollution de l’air a des effets délétères bien connus. En voici un autre, moins relayé et aujourd’hui mis en évidence par une équipe du centre de recherche Bordeaux Population Health. En suivant pendant dix ans près de 700 personnes de plus de 75 ans, les chercheurs viennent de tisser un lien entre pollution atmosphérique et santé oculaire. Il s’agit de la première étude prospective réalisée sur ce sujet.

L’étude épidémiologique publiée dans la revue Environnemental Resarch confirme qu’une exposition prolongée aux particules fines, notamment celles produites par le trafic routier, favoriserait le vieillissement oculaire et pourrait conduire au glaucome. Cette maladie neurodégénérative du nerf optique se caractérise par un amincissement de la couche des fibres nerveuses de la rétine, c’est d’ailleurs la deuxième cause de cécité dans le monde.

Les 683 participants issus de la cohorte bordelaise Aliénor ont passé des examens oculaires tous les deux ans entre 2009 et 2020 afin de suivre l’évolution de l’épaisseur des fibres nerveuses de la rétine et de déterminer ainsi indirectement la vitesse avec laquelle leurs yeux vieillissaient. Parallèlement, les scientifiques ont estimé l’exposition de ces personnes à la pollution atmosphérique grâce à des mesures de la concentration de différents polluants de l’air avec une précision de 100 mètres autour de leur lieu de résidence. Ces données ont été obtenues à l’aide de cartographies d’exposition annuelle basées sur des mesures de stations de contrôle de la qualité de l’air. Parmi les polluants pris en compte : le dioxyde d’azote et deux types de particules fines.

Les résultats sont sans appel. Les bordelais exposés à des concentrations plus élevées de particules fines étaient victimes d’un amincissement accéléré de la couche de cellules nerveuses de leurs rétines, signant un vieillissement plus rapide des yeux.

Pour l’équipe scientifique, cette découverte permet bel et bien de suggérer que l’exposition à une forte concentration de polluants au cours du temps pourrait augmenter le risque de glaucome. Et ce en prenant en compte le fait qu’en ce qui concerne les particules fines PM2,5, les estimations de l’exposition moyenne sur 10 ans étaient inférieures au seuil annuel réglementaire de l’Union européenne pour tous les participants, mais supérieures aux valeurs limites recommandées par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) encore abaissées en 2021. « Ces résultats confirment les observations précédentes sur les effets de la pollution sur les processus neurodégénératifs, ici au niveau oculaire. Ils constituent un argument supplémentaire en faveur de la baisse des seuils réglementaires européens comme recommandé par l’OMS, ainsi que de la diminution de l’exposition effective de la population française, qui continue de dépasser par endroits les seuils réglementaires actuels », explique Laure Gayraud, première autrice de l’étude.

La prochaine étape pour les chercheurs consiste désormais à élargir le terrain d’étude à l’échelle nationale, grâce à des données issues d’autres cohortes françaises, afin d’approfondir d’autant plus les connaissances sur les effets des polluants sur le vieillissement oculaire.

A noter une interview de Cécile Delcourt, directrice de recherche Inserm/Université de Bordeaux sur le site Curieux ! qui explique la relation entre pollution et maladies oculaires.

Lien vers le communiqué de presse de Bordeaux Population Health.

Lien vers l’article d’ environnemental research  (en anglais).

Lien vers l’article du site Curieux !

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