La médiatisation éphémère de la profession d’infirmier, applaudie et encensée lors du premier front contre le coronavirus, n’a pas écarté Marie Mora de sa nouvelle voie, en cohérence avec son rôle d’infirmière : faire le lien entre la santé et l’environnement. Accompagner, éveiller, diffuser des connaissances et réduire les expositions aux sources de pollution. En clair, une nouvelle éco-infirmière sillonne désormais la région Nouvelle-Aquitaine.
Si prendre soin est une vocation, plusieurs chemins y conduisent. Inspirée par sa collègue Céline Coupeau, éco-infirmière, Marie Mora a décidé de réorienter sa manière d’exercer pour faire du lien entre ses engagements personnels et son métier de soignante. Diplômée de l’IFSEN en 2019, puis formée aux ateliers du WECF France à Annemasse (atelier Nesting et Ma Maison Ma Santé), Marie Mora est désormais entrepreneur au sein de la coopérative Coop’Alpha, en tant qu’infirmière en santé-environnement. L’écoute, l’empathie, l’accompagnement au changement, la valorisation du savoir expérientiel : tout cela fait partie de son ADN après 15 ans dans différents services hospitaliers, à l’étranger sur des projets humanitaires puis dans le secteur médico-social auprès de personnes souffrant d’addictions.
« Le changement ne se décrète pas mais il peut être accompagné, en respectant le rythme de chacun. En informant sans effrayer, en tenant compte de l’envie et des besoins de la personne, en mettant en lumière sa propre capacité d’agir pour sa santé », souligne Marie Mora, plaçant l’empowerment des participants au cœur de sa pédagogie. D’où son orientation vers les soins de nature préventive, surtout là où tout commence, dans les milieux liés à la petite enfance, avec les futurs parents, … « Je suis à l’aise dans l’accompagnement des professionnelles de la périnatalité et dans le soutien à la parentalité. J’ai déjà participé avec Céline Coupeau à la formation initiale des assistantes maternelles et des auxiliaires de puéricultures en Corrèze et nous travaillons actuellement à la rédaction d’un guide pour former les formateurs afin qu’ils puissent prendre le relais. Les professionnels sont de plus en plus soucieux de ces enjeux, la nouvelle génération est très réceptive. Je suis intervenue récemment dans un IFSI, dans le cadre d’une unité optionnelle « santé-environnement » : à l’issue du cours, une jeune infirmière est venue me parler de ses convictions, de son envie de se tourner vers cette nouvelle sphère. Cette envie de faire autrement émerge aujourd’hui bien plus rapidement. Et j’entends bien contribuer à la généralisation de cette prise de conscience ! »
MAM’SEM : 9 mois pour devenir une éco-nounou
Mais pour l’heure, Marie Mora commence une action pilote dans le cadre de l’appel à projet de la Stratégie Régionale Petite Enfance de l’Agence Régionale de Santé Nouvelle-Aquitaine. MAM’SEN, à prononcer « mam saine », est un programme pour faire évoluer les comportements en faveur d’un environnement sain. Il s’agit d’accompagner des professionnels de la petite enfance sur le terrain, afin de créer un environnement d’accueil sain pour les tout-petits. Les interventions auront lieu dans 3 Maisons d’Assistants Maternels en Gironde et 3 en Dordogne et s’étaleront sur 9 mois. « Cela commencera par un atelier Nesting pour donner une vue d’ensemble (air intérieur, protocole de nettoyage, activités, jouets, alimentation, soin de l’enfant et liens entre santé et environnement), apprendre à repérer les polluants dans les matériaux et produits de consommation courante et de prévenir les risques en trouvant des solutions alternatives plus saines à mettre en place. Trois mois après, je propose un atelier d’accompagnement au changement inter-M.A.M. afin de renforcer la motivation, les échanges de pratiques, pour terminer par un dernier temps collectif pour valoriser la démarche avec les parents, les pairs et les partenaires. En parallèle, j’accompagne chaque MAM dans un diagnostic, la co-écriture d’une feuille de route basée sur le guide Recocrèches. Ce dispositif est suivi à distance tout au long du projet pour apprécier l’évolution, avec la mise en place d’un outil d’auto-évaluation. Et nous allons ouvrir un groupe de conversation sur une application pour pouvoir échanger avec toutes les MAM qui participent au programme. L’idée est de créer une communauté d’entraide pour échanger sur de nouvelles initiatives, ou encore des expériences réussies. Apporter des connaissances est indispensable mais ce n’est pas suffisant ; il faut aussi rendre les personnes actrices – et pas seulement réceptrices – en les aidant à faire un petit pas dans la bonne direction et le collectif peut aider à cette dynamique», souligne Marie Mora. Le projet commence en mars.