Ce n’est pas un épiphénomène, d’après une étude soumise à la revue The Lancet Planetary Health. Parmi les 10 000 jeunes du monde entier interrogés, 75% jugent le futur « effrayant ». L’éco-anxiété, est-ce une maladie ? Comment en guérir ? Pour y répondre, l’équipe d’Happy Hour, dans le cadre de la Fête de la Science, a invité Laure Nouallah, journaliste spécialisée sur les questions d’écologie ainsi que Charline Schmerber, thérapeute et autrice. Le replay de cette conférence, qui a accueilli une centaine de personnes à Cap Sciences le 13 octobre, est disponible sur YouTube.
Eco-anxieux, extra lucides
Risque-t-on de voir apparaître une génération entière en mauvaise santé mentale, affectée par cette conscience d’une planète qui s’effrite ? A cette première interrogation, la réponse est claire pour Laure Nouallah, autrice de « comment rester écolo sans finir dépressif » : les éco-anxieux sont en très bonne santé ! « Ce n’est pas une pathologie, c’est une réaction normale, rationnelle, saine, face à un écosystème qui se dégrade. C’est même un signe de très bonne santé mentale.
La décennie 2020-2030 est celle de la révélation. L’éco-dépression est une période transitoire nécessaire pour retrouver son élan vital. C’est le deuil du XX° siècle, du « just do it », du « yes we can ». Jusqu’à présent, on pouvait prendre un low cost pour aller voir une expo de Jérome Bosh à Madrid… ou bien d’autres choses. Tomber en éco-dépression : c’est salvateur. » Même analyse du coté de Charline Schmerber : « C’est un passage obligé pour apprendre à faire le deuil, à travailler sur la résilience émotionnelle, se confronter à la tristesse et pouvoir se relever. Je suis là pour accompagner dans le sombre ».
Des symptômes et remèdes polymorphes
Les formes du malaise sont variées. Charline Schmerber en dénombre trois : « des manifestations d’anxiété, de dépression, des ruminations, obsessions, pensées en boucle et des répercussions fonctionnelles qui vont impacter la vie : questionnement sur le désir d’enfant, troubles du comportement alimentaire, trouver un sens à sa vie professionnelle et vie sociale. Cela crée une véritable crise existentielle avec beaucoup de remises en questions. Je peux recevoir de jeunes patients qui s’interrogent sur leur orientation universitaire, des parents qui ne comprennent plus leurs enfants… ».
Faute d’information, Charline Schember déplore le manque de thérapeutes spécialistes du sujet qui demeurent encore trop rares. Il ne s’agit pas de réduire l’éco-anxiété à des problèmes personnels, familiaux, à des névroses d’enfance. Pour en comprendre les causes et l’apaiser, encore faut-il être en résonnance avec le vécu. Car il s’agit avant tout d’insister sur la reconnexion de l’humain avec l’environnement, de travailler sur le corps, le ressenti. « Mon travail consiste à permettre à la personne de trouver elle-même ses solutions. Mais j’aborde les notions de prendre soin de soi, du plaisir, des autres, du monde vivant, du rapport au temps. Je propose différentes pistes, à elle de piocher. Cela peut être des choses toutes simples comme aller en forêt, travailler au contact de ces êtres vivants, s’engager dans une association en lien avec ce monde du vivant… »
A revoir en replay ici : www.youtube.com